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CITATIONS - TEXTES - ESPACE


CITATIONS - TEXTES - ESPACE

 

FORMES ET NARRATIONS

DE L'ESPACE

AU CINEMA

 

Notes - citations - textes

 

 

 

 

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« Ce qui est important pour moi, c’est l’espace. Donnez-moi un coin de rue ou un escalier, et je peux en tirer une histoire. J’ai besoin de quelque chose de concret à partir de quoi je peux faire fonctionner mon imagination.


Pour moi, ce qui vient donc en premier, c’est le lieu et sa configuration. »

 

Wong Kar Waï

 

 

 

« Tous mes films sont des tentatives de filmer un lieu ; mais ce qu’un lieu a à raconter, c’est toujours les êtres qui l’habitent et le traversent.

 

Filmer un lieu, c’est saisir concrètement la fatigue et la solitude des hommes face la dureté de la vie. Quelque soit la taille du lieu, le monde de chacun est fait de

peu de gens »

 

Jia Zhang-ke

 

 

 

« Je m’attaquais à me rappeler exactement la ligne du toit, la nuance de la pierre qui, sans que je pusse comprendre pourquoi, m’avaient semblé pleines, prêtes à s’entrouvrir, à me livrer ce dont elles n’étaient qu’un couvercle… »

 

Marcel Proust

 

 

 

 

 

 

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Descendre dans la rue

 

« Tout phénomène peut être vécu de deux façons. Ces deux façons ne sont pas arbitrairement liées aux phénomènes – elles découlent de la nature des phénomènes, de deux de leurs propriétés :

 

Extérieur – Intérieur

 

Si nous observons la rue à travers la fenêtre, ses bruits sont atténués, ses mouvements sont fantomatiques et la rue elle-même, à cause de la vitre transparente, mais dure et rigide, paraît un être isolé palpitant dans un « au-delà ».

 

Mais que l’on ouvre la porte : nous sortons de l’isolement, nous participons de cet être, nous y devenons agissants et nous vivons sa pulsation par tous nos sens. L’alternance continue du timbre et de la cadence des sons nous enveloppe, les sons montent en tourbillon et subitement s’évanouissent. De même, les mouvements nous enveloppent – jeu de lignes et de traits verticaux et horizontaux, penchés par le mouvement en direction différentes, jeu de taches colorées qui s’agglomèrent et se dispersent, d’une résonnance parfois aigüe, parfois grave.»

 

Wassily Kandinsky, Point et ligne sur plan, Folio essais, Gallimard, 1991, pp.15-16

 

 

 

 

 

GILLES DELEUZE

L’Image Mouvement

 

Composition interne de l’image,

deux polarités ou tendances :

 

 

Raréfaction (des éléments qui composent une image)

 

Saturation (des éléments qui composent une image)

 

 

 

***

 

 

 

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Emily Richardson - Aspect - 2004

 

En savoir plus

 

 

 

 

« Le Cinéma est un œil grand ouvert sur la vie, œil plus puissant que le nôtre et qui voit ce que nous ne voyons pas. »

 

 

Germaine Dulac, L’essence du cinéma – l’idée visuelle (1925), dans Ecrits sur le cinéma, 

Germaine Dulac, textes réunis et présentés par Prosper Hillairet, Paris Expérimental,

2020,p.107.

 

 

 

 

 

 

 

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GROS PLAN

 

« Elle a été souvent répétée cette importance quasi divine que prennent, en gros plan, les fragments de corps, les éléments les plus froids de la nature ! Un revolver dans un tiroir, une bouteille brisée à terre, un œil circonscrit dans l’iris, s’élèvent par le cinéma à la dignité de personnage du drame. Etant dramatiques, ils paraissent vivants, comme étant situés dans l’évolution d’un sentiment »

 

 

« Un gros plan de revolver, ce n’est plus un revolver, c’est le personnage-revolver, c'est-à-dire le désir ou le remords du crime, de la faillite, du suicide. Il est sombre comme les tentations de la nuit, brillant comme le reflet de l’or convoité, (…), brutal, lourd, froid, méfiant, menaçant. Il a un caractère, des mœurs, des souvenirs, une volonté, une âme. »

 

ECRITS SUR LE CINEMA 1

Jean Epstein

p.140/141

 

 

 

« Le cinéma de l’avenir est là aussi, vers la personnification du détail grossi,

l’individualisation du fragment, où le drame se noue, se situe, s’agite.

 

 

Avant de l’avoir vu au cinéma je ne savais pas ce que c’était qu’une main !

L’objet par lui-même est capable de devenir une chose absolue,

émouvante, tragique. »

 

Fernand Léger, Fonctions de la peinture, p.109

 

 

 

« L’isolement de tout gros plan présente une sorte d’ « objet surréaliste », c'est-à-dire d’ « objet dépaysé », détourné de son sens et de son emploi communs, pour un sens et un emploi spéciaux, parfois concrètement très limités, parfois symboliquement très étendus, mais toujours en conformité avec le climat sentimental, avec la rêverie, suscités par le film. »

 

ECRITS SUR LE CINEMA 1

Jean Epstein

p.236

 

 

 

« Le gros plan est l’âme du cinéma.  »

 

« Jamais je ne pourrais dire combien j’aime les gros plans américains. Nets. Brusquement l’écran étale un visage et le drame, en tête à tête, me tutoie et s’enfle à des intensités imprévues. Hypnose. Maintenant la tragédie est anatomique. Le décor du cinquième acte est ce coin de joue que déchire sec le sourire. »

 

 

ECRITS SUR LE CINEMA 1

Jean Epstein

p.93/94

 

 

 

 

« L'image-affection, c'est le gros plan, et le gros plan, c'est le visage »

 

Gilles Deleuze, L’Image mouvement, p.125 

 

 

 

« Je ne connais rien de plus absolument émouvant qu’au ralenti un visage se délivrant d’une expression. (.. .) Un tel pouvoir de séparation du sur-œil mécanique et optique fait apparaître clairement la relativité du temps. Il est donc vrai que des secondes durent des heures !

 

Le drame est situé en dehors du temps commun.

Une nouvelle perspective, purement psychologique, est obtenue.

 

Je le crois de plus en plus. Un jour le cinématographe, le premier, photographiera l’ange humain. »

 

 

ECRITS SUR LE CINEMA 1

Jean Epstein

p.191

 

 

 

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PLAN SEQUENCE

 

 

 

Le plan séquence ne s'oppose pas nécessairement au montage : il peut proposer une multiplicité de sentiments, de points de vues, de cadrages dans un mouvement continu. Il permet de filmer la variation d'un état au cours du temps, la variation de points de vues, la variation de l'espace dans le temps et du rapport entre narration, personnage et espace au cours du temps.

 

 

 

 

Aspect "chorégraphique" :

 

 

« (…) Antonioni a composé, entre ses personnages qui parlent et sa caméra qui les regarde parler, un type de relation que nous ne saurions qualifier autrement que par le mot ballet. »

 

 

Noël Burch, Une praxis du cinéma, Folio essais, Gallimard, Paris, 1986, p.117.

 

 

 

Aspect "plastique" :

 

Elie Faure propose de définir le cinéma par son mouvement, sa « plasticité » :

 

« Le cinéma est plastique d’abord : il présente, en quelque sorte, une architecture en mouvement qui doit être en accord constant, en équilibre dynamiquement poursuivi avec le milieu et les paysages où elle s’élève et s’écroule.»

 

Par « plastique », Elie Faure pense à « l’art d’exprimer la forme au repos ou en mouvement » dans la « (…) peinture, fresque, danse (…) ».

 

 

Elie Faure, Fonctions du cinéma

 

 

 

 

Aspect "mouvant" :

 

 

Jean Epstein par le d’un « paysage mouvant », c'est-à-dire un paysage transfiguré, modifié, décuplé, multiplié, par le cinéma :

 

« De fait, le paysage le plus banal, le décor le plus ordinaire, (…) peuvent devenir intéressants à l’écran, c'est-à-dire photogéniques, s’ils y sont montrés au cours d’une continuelle évolution de leurs formes, que cette évolution résulte de l’action et du déplacement du sujet lui-même ou d’un travelling ou d’un panoramique ou enfin de l’intensité, sans cesse variée, de l’éclairage. »

 

Jean Epstein, Ecrits sur le cinéma 1, Paris, Seghers, 1974, p.346.

 

 

 

 

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ESPACE / LIEU / PAYSAGE

 

Espace

 

Terme général. Etendue

"L'espace se présente dans l'expérience quotidienne comme une notion de géométrie et de physique qui désigne une étendue, abstraite ou non."

 

Peut sous-entendre la notion d’espacement, un espace sous-entend une distance entre deux choses.

 

 

Lieu

 

Un lieu est un espace que l’on peut nommer, délimiter. « Le lieu du crime », nom qui sert à identifier un espace.

 

Un lieu c’est un croisement de rues, c’est un bâtiment, un quartier, une ville, un bar, une chambre. Un lieu s’identifie à des caractéristiques.

 

Un lieu c’est un nom sur une carte, le lieu-dit. C’est un emplacement sur une carte.

 

 

 

Paysage

 

Notion en évolution permanente.

Un regard esthétique, implique un observateur, un point de vue (le point de vue paysager, le point de vue touristique).

Et implique donc également un cadre ou cadrage :

L’observateur délimite un bout d’espace (souvent un espace large), ou de nature, et le nomme « paysage »

 

Un cadrage cela veut dire que le paysage est du côté de l’image, c’est une pensée du réel comme image.

 

Le paysage implique une distance, un lointain :

c’est une vision à distance.

 

 

 ***

 

 

Les réalisations picturales actuelles (1914)

 

 

« Si l’expression picturale a changé, c’est que la vie moderne l’a rendue nécessaire. (…)

Un paysage traversé et rompu par une auto ou un rapide perd en valeur descriptive,

mais gagne en valeur synthétique ; la portière des wagons ou la glace de l’auto, joints à la vitesse acquise,

ont changé l’aspect habituel des choses. (…)

Il est certain que l’évolution des moyens de locomotion et leur rapidité sont pour quelque chose dans le visuel nouveau. »

 

Fernand Léger, Fonctions de la peinture

(1965) Folio, Gallimard, Paris, 2009, p.40.

 

 

 

« Qu’est-ce qu’un paysage ? Où commence-t-il  et finit-il ?

Quel est le tribunal assez prétentieux pour définir les éléments qui le composent ? »

 

Fernand Léger, Fonctions de la peinture

(1965) Folio, Gallimard, Paris, 2009, p.129

 

 

 

 

 

 

THE TRUMAN SHOW

 

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Une île

 

 

Gilles Deleuze dans son texte "Causes et raisons des îles désertes" explique combien, géographiquement et dans nos imaginaires, les îles sont des espaces où on se sépare (du reste du monde) et des espaces du recommencement à zéro.

 

 

 

 

« D’un côté, l’île est le lieu de l’utopie, où l’on peut rêver bâtir une vie nouvelle, repartir à zéro, en fuyant les violences et les tourments que l’on laisse derrière soi, sur le continent.

 

D’un autre côté, bien évidemment, le paradis retrouvé se révèle assez vite n’être qu’une illusion, le refuge insulaire n’est pas si protecteur que l’on imaginait, la violence à laquelle on croyait échapper finit par vous rejoindre, ou par être remplacé par d’autres violences (…). L’île est rêvée, d’abord, comme le lieu d’un nouveau départ, et ce rêve finit forcément par échouer. »

 

 

Guy Scarpetta (écrivain), Une île, in Simulacres - d’îles en îles, 2000

 

 

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Truman rêve de quitter son île pour une autre île. Christof prétend qu'il ne souhaite pas sortir de lui-même de sa "prison" :

 

 

 

Le syndrome de la cabane


Le syndrome de la cabane (aussi appelé le syndrome de l'escargot) correspond à la peur de sortir de son lieu d'enfermement. Dans ce contexte d'épidémie de Covid-19, ce syndrome fait concrètement écho à la peur de se déconfiner et de se confronter au monde extérieur. Ici, la cabane ou la coquille de l'escargot représente un petit écrin dans lequel, pendant 8 semaines, on s'est senti préservé de toutes agressions extérieures. "Ce syndrome n'est pas nouveau, il a été théorisé au début du XXè siècle après la Ruée vers l'or qui a débuté en 1948 aux Etats-Unis en Californie. A cette époque, des hommes partaient plusieurs mois chercher les précieuses pépites et dormaient dans de petites cabanes de fortune complètement isolées de la civilisation. A leur retour, ils éprouvaient une certaine méfiance à l'égard des gens qui les entouraient, une peur de la vie sociale ainsi qu'une nostalgie de leur vie recluse", raconte Johanna Rozenblum. C'est aussi un syndrome visible après une longue hospitalisation ou dans certaines professions comme les gardiens de phare.

 

 

 

 

 

 

Une ville

 

 

"Parmi les sources d'inspirations possibles, il faut citer Le Temps désarticulé de Philip K. Dick (1959), dans lequel le héros, vivant le modeste quotidien d'une petite ville californienne idyllique de la fin des années 50, découvre peu à peu que sa ville entière n'est qu'un mirage destiné à le maintenir comblé... L'expérience dont rendent comptent Le Temps désarticulé et The Truman Show témoigne du fait que le paradis californien de la consommation au temps du capitalisme avancé n'est d'une certaine manière, dans son hyperréalité même, qu'irréel, privé de substance et d'inertie matérielle."

 

Slavoj Zizek, Bienvenue dans le désert du réel, p.34-35.

 

 

 

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The Truman Show a été tourné à Seaside, « communauté planifiée » en Floride, qui pour les besoins du film sera renommée Seahaven. Il fut un temps envisagé de tourner en studio afin de rendre compte au mieux de l’artificialité requise par le scénario, mais, paradoxalement, les studios hollywoodiens « faisaient trop réalistes. » Seaside fut construite selon les principes du New Urbanism, mouvement de design urbain repris également par Disney pour la construction de sa propre ville : Celebration. Le New Urbanism est régulièrement critiqué pour sa nature « Disney-esque », et pour le fait qu’il « a l’air « faux » ou a l’air trop « délibérément nostalgique ».

 

Le New Urbanism (NU), est un courant d’architecture et d’urbanisme d'Amérique du nord, qui est notament perçu comme un mouvement de type postmoderne cherchant à insuffler des images passéistes de « petite ville traditionnelle ».

 

 

 

 

Villes planifiées / Nouvel urbanisme

 

L’idée ambitieuse que sous-tend le Nouvel urbanisme, ou urbanisme néo-traditionnel, ce jeune mouvement de planification urbaine (…) est la suivante : en intervenant de manière appropriée sur notre cadre bâti – c’est-à-dire en appliquant à la lettre les principes de sa doctrine –, il devient possible de contrer les maux qui affligent villes et sociétés modernes. En somme, il suffirait de construire adéquatement un quartier, voire une ville entière, pour induire chez ses habitants un fort sentiment d’appartenance, d’ancrage historique et culturel, pour renforcer la cohésion sociale et, ainsi, diminuer de façon notoire l’aliénation des individus, le crime et la violence.

 

Volontaire et sélectif

 

Contrairement aux dispositifs pour le moins carcéraux et exclusifs des quartiers résidentiels sécurisés (mur d’enceinte infranchissable, portail sécurisé, caméras de surveillance et guérite de contrôle), les « villages néo-urbains » ne semblent pas miser, au premier abord, sur un modèle aussi protectionniste que celui des enclaves à haut-standing importées de Californie.

 

A l’exception peut-être de la petite ville de Celebration – apparemment nichée au coeur d’une forêt bucolique, mais bordée par une limite infranchissable qui correspond au tracé rectiligne du territoire foncier acquis par Disney –, les autres bourgades de l’urbanisme nouveau ne sont généralement pas ceinturées de murs et de grilles. Un contrôle plus insidieux y opère néanmoins. Cela commence par un processus, plus ou moins subtil, de sélection des futurs acquéreurs. On imagine assez facilement le cas extrême où un conseil de quartier élu par délégation pourrait, par exemple, évaluer la justesse des motivations d’un candidat-résident, son potentiel de participation à la vie communautaire, etc. Mais même sans un tel dispositif, la simple valeur foncière des biens à acquérir opère une forme de sélection naturelle, avec le résultat qu’on connaît : les habitants de ces quartiers ont en général la peau blanche, et un revenu très supérieur à la moyenne. Mais le dispositif de régulation propre à ces lotissements va plus loin. En intégrant une communauté, l’individu s’engage – souvent tacitement, parfois de manière contractuelle – à respecter le code de bonne conduite du lieu en question. Il sourira à ses voisins, fera un effort d’intégration, acceptera quantité de règles quant à la circulation automobile, à la couleur des moulures ornant sa maison. Il tondra sa pelouse aux heures prescrites et gérera ses déchets de manière éco-citoyenne. Bref, il mènera une vie bien rangée, dans un cadre « idéal ».

 

Le monde de l’art, de la fiction romanesque en passant par la télévision ou le cinéma, a su mieux que tout autre anticiper le côté effrayant de ces sociétés « idéales ». Renversements par l’absurde et dystopies sociales abondent, que l’on pense au film Métropolis (1927), aux fictions littéraires Brave New World (1932) et 1984 (1948), ou encore à la série culte The Prisoner (1967-68). Bien que construites autour de scénarios « exacerbés», toutes ces oeuvres illustrent avec une probante efficacité les revers, pour nos sociétés, de la mise en place de régimes idéalisateurs et autoritaires. Mais malgré la lucidité de ces mises en garde, le Nouvel urbanisme s’installe et façonne chaque jours des portions plus vastes du territoire.

 

 

Texte extrait de : https://www.espazium.ch/fr/actualites/le-culte-de-la-ville-parfaite

 

 

 

 

 

 

Disney et la ville "idéale"

 

 

 

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E.P.C.O.T. : Le projet original de Walt Disney (ville, complexe industriel, aéroport, centre urbain, world showcase)

 

On pense que Walt avec l’aide de ses imagineers, a commencé à ébaucher le concept bien avant que le public soit au courant des projets pour la Floride, dans les années 60. Une ville futuriste devait être créée au sein du nouveau complexe. 

 

Un peu comme Disneyland, la ville était circulaire avec une grande place en son centre, des entreprises et une haute tour qui abriterait un hôtel. Tout partirait de ce centre, comme les rayons du soleil. Le centre aurait donc abrité des bureaux, des centres de conventions, un hôtel et une gare multimodale, tout cela sous un toit commun où le climat serait contrôlé. Le long du périmètre de ce cercle, il y aurait eu les immeubles à fortes densités et maisons des actifs de la ville. Au-delà était prévu une ceinture verte abritant écoles, terrains de sports, complexes de loisirs pour les habitants d’EPCOT uniquement. Et encore plus loin les secteurs à faibles densités avec des maisons et des grands parcs pour que les enfants puissent jouer sans risques, le trafic de la ville étant souterrain.

 

La zone de shopping appelée International Shopping Areas aurait été le centre commercial d’EPCOT où les habitants et visiteurs auraient pu acheter des produits du monde entier, manger dans des restaurants représentatifs de cette ouverture sur le monde, voir des spectacles et dîners spectacles dans ce même esprit. Ce downtown aurait été desservi par des transports futuristes. Le complexe industriel de Walt Disney World utilisait aussi ce plan radial. Ici Disney aurait travaillé avec différentes sociétés pour créer un étalage d'industrie.

 

Les technologies de transport réutiliseraient celles déjà développé par Walt et ses imagineers pour les parcs à thème : le monorail et le people mover. Le monorail aurait desservi directement le centre-ville avec une station sous l’hôtel. De là, le people mover aurait alors desservi toute la ville comme une étoile avec près de 20 voies composées de stations intermittente et non d’arrêt. Les voitures auraient été utilisées seulement pour les longs voyages et en souterrains. Il n’y aurait que des trottoirs à la surface pour l’esthétique et la sécurité.

 

 

 

 

« EPCOT ... prendra ses racines dans les nouvelles idées et les nouvelles technologies qui émergent aujourd'hui des centres créatifs de l'industrie américaine. Ce sera une communauté de demain qui ne sera jamais terminée, mais qui toujours présentera, évaluera et démontrera de nouveaux matériels et systèmes. Et EPCOT sera toujours une vitrine pour le monde de l'ingéniosité et l'imagination de la liberté d'entreprise américaine."

 

"Ce sera une communauté planifiée et contrôlée, une vitrine de l'industrie, de la recherche et des écoles américaines, des opportunités de la culture et de l'éducation. Dans EPCOT il n'y aura aucun ghetto parce que nous ne les laisserons pas se développer. Il n'y aura aucun propriétaire terrien et donc aucun contrôle de vote. Les gens loueront des maisons au lieu de les acheter, et à de modestes loyers. Il n'y aura aucun retraité ; chacun doit être employé."

 

Walt Disney

 

 

 

 

"Disneyland est un modèle parfait de tous les simulacres enchevêtrés. (...) Mais ce qui attire les foules, c'est sans doute bien davantage le microcosme social, la jouissance religieuse, miniaturisée, de l'Amérique réelle, de ses contraintes et de ses joies. On parque à l'extérieur, on fait la queue à l'intérieur, on vous abandonne totalement à la sortie.(...) Le contraste avec la solitude absolue du parking - véritable camp de concentration - est total"

 

Jean Baudrillard, Simulacres et simulation, p.24-25

 

 

 

 

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Un studio

 

 

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Le premier studio de cinéma :

 

Studio construit par Thomas Edison,

et surnommé "Black Maria", repris du nom argotique pour désigner un fourgon de police.

 

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Thématiques et questionnements (rappel) :

 

 

- l'île

 

 

- la ville "idéale"

 

 

- le studio (cinéma hollywoodien)

 

 

- le parc (d'attraction)

 

 

- la ville publicitaire / capitaliste (tout est à vendre)

 

 

- les limites (géographique, psychologique, sociétale)

 

 

- la circularité (répétition, enfermement, boucles)

 

 

- la visibilité totale (et le totalitarisme)

 

 

- les emboîtements d'espaces (le studio comme miniature du monde dans le monde)

 

 

- la place du spectateur/ des spectateurs/trices (mise en abîme, questionnements de notre place)

 

 

- deux films en un : celui de Weir et l'émission de Chritof (et leurs entremêlements thématiques, narratifs et formels)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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"Le spectacle est le mauvais rêve de la société moderne enchainée, qui n'exprime finalement que son désir de dormir.

 

Le spectacle est le gardien de ce sommeil."

 

Guy Debord, La société du spectacle (1967), folio, p.24.

 

 

 

 

 

 

«Quand vous regardez une série sur Netflix et que vous en devenez accro, vous veillez tard le soir. À la marge, nous sommes en concurrence avec le sommeil. Et ça fait donc beaucoup de temps.»

 

 

Reed Hastings, Netflix

 

 

 

En 2004, le PDG du groupe TF1 Patrick Le Lay avait marqué les esprits en affirmant que le métier de sa chaîne de télé consistait à vendre «du temps de cerveau disponible» à Coca Cola et autres grands annonceurs publicitaires.

 

 

 

 

 

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Guy Scarpetta (Simulacres - d’iles en îles) :

 

« Un paysage marin est impossible à cadrer. La mer est là, tout autour, ce n’est pas un plan fixe que l’on aurait devant soi, et que l’on pourrait délimiter, c’est aussi, forcément, du hors-champ. Donc, soit on réalise un cadrage arbitraire, on prélève un fragment au détriment de l’ensemble, et l’on risque de tomber dans le cliché, dans la carte postale ; soit on reconnaît que le champ ne se laisse pas délimiter, (…) on se mesure au dilemme de la localisation nécessairement exclusive. Il n’y a pas de « bonne distance », et il faudrait pouvoir embrasser le volume entier, même dans un panoramique… »

 

« Trouver la bonne distance, savoir où placer la caméra, cela suppose un point, qui soit le centre de ce qu’on veut filmer. Dans un paysage de type insulaire, pas de centre, pas de point. »

 

 

 

 

 

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LA VICTOIRE

René Magritte

1939

 

 

 

 

 

 

 

 

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COLLATERAL

Michael Mann

2004

 

 

 

 

Thématiques / COLLATERAL

 

 

-l'île utopique (le rêve d'une vie meilleure inaccessible)

 

-la ville moderne / réseau / nocturne

 

-le taxi

(espace fermé/traversant/traversé – refuge – espace de confession intime)

 

-l’opposition/l'échange entre Max et Vincent (et Annie)

(le prolétaire, l’homme d’affaire, la procureure)

 

-Le parcours / le programme
(l'homme comme machine, exécutant)
 
-Le travail (le professionnalisme)

(passion/vie)

 

-La transparence / l’imbrication

(dedans/dehors – reflets – incrustations) 

 

- le devenir imperceptible / fantôme

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

"les êtres (des pros) ne s’opposent jamais tant à un adversaire qu’à l’intérieur de ce réseau où tout communique : ils sont conduits […] à faire l’expérience de leur contraire. Ce régime ambivalent de la géographie urbaine (tunnels, autoroutes, échangeurs, escalators, ascenseurs, couloirs...) pourrait sembler bien théorique si le système formel de Mann, à son niveau le plus essentiel, ne réalisait pas à travers ces croisements, ces entrelacs, ces collisions, ces interférences, une physique qualitative et concrète des matières (métaux, verres, et surtout lumières) qui le constitue. La surimpression, la découpe et le fond, le fondu enchaîné, le reflet, la surexposition, l’éclairage artificiel, le champ et sa profondeur, ne sont plus les attributs exclusifs du cinéma, ils forment la réalité plastique de la cité surmoderne, de ce qu’il conviendrait d’appeler à la suite de Thierry Paquot l’ « après-ville »[1]."

 

            Cette réversibilité permanente conduit logiquement à une forme d’indistinction, d’illisibilité : les personnages doivent réciproquement intégrés le système opposé, « passer de l’autre côté » quitte à succomber à ce que Jean Baptiste Thoret appelle « la tentation de l’autre[2] ». Cet échange de propriétés est très littéralement signifié par le retournement de la voiture dans un carrefour, lorsque Max se décide à reprendre le contrôle de cette embardée destructrice. Le logiciel de Vincent se grippe, le conduit à sortir de l’habitacle du véhicule pour se mêler aux fluctuations urbaines et y improviser sa partition. Au bout d’une poursuite où les rôles se trouvent inversés, c’est une tour de bureau qui se fera l’intermédiaire entre un Max qui a intégré le modus operandi du tueur et celui-ci, qui, se vidant de son sang, ne cesse de fuir et de se laisser déborder. Vincent doit avant tout user de ses instincts fauves pour parachever le programme par la liquidation de l’avocate entraperçue au début du film. Mais c’est bien Max qui dirige les opérations depuis l’extérieur du gratte-ciel d’où il peut, par transparence, planifier le parcours de la jeune femme pour que celle-ci échappe au tueur. Etage après étage, Max doit ainsi trouver la meilleure combinaison, cocher les cases du quadrillage de la tour comme il le faisait lors de sa première apparition à l’écran avec un jeu de mots croisés et ainsi reprendre l’avantage. Vincent doit, lui, briser la glace (très littéralement les multiples baies vitrées qu’il pulvérise pour retrouver sa victime). Court-circuitant le système électrique du building, il pense se rendre invisible mais se trouve comme trahi par la ville elle-même. Dans cet espace où l’obscurité totale n’est pas de mise, la silhouette de Vincent se détache en effet sur l’écran lumineux de Los Angeles, ce qui permet à la jeune femme de le repérer. Pris dans ces faux-semblants et le mouvement des transports en commun, Vincent pousse la course jusqu’à se dissoudre, fondu dans le flux urbain. Sa mort vient ainsi conforter la rigidité glaçante de sa propre vision de Los Angeles : si quelqu’un meurt dans le métro, on ne le remarque pas. 



[1] Jérôme Baron, « A propos de Miami Vice », 2007. Texte publié à l’occasion de la diffusion de Miami vice dans le cadre de la saison 2007-2008 de la Séance des Ciné Sup, Nantes.

[2] Jean-Baptiste Thoret, « Gravité des flux », Panic, no 5, décembre 2006, p. 24-33.

 

 

 

Damien Angelloz-Nicoud dans Codes, signes et flux de la ville écran dans Collatral et Miami Vice in "Ecrire la ville au cinéma", coordonné par Nicolas Droin et Mélanie Forret

 

 

 

 

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La fêlure / Devenir imperceptible/fantôme

 

 

"Quelque chose s'est brisé que l'on ne pourra plus recoller, mais quand ?"

 

Autrefois militant enthousiaste et frondeur, désormais figure révolue de la contestation, Lowell Bergman [(Al Pacino), dans The Insider (Révélations) ], aura vécu le drame fitzgeraldien par excellence : "Je me rendis compte que je m'étais fêlé non pas au moment où je recevais le coup mais au cours d'un sursis" [écrit Francis Scott Fitzgerald dans la nouvelle La Fêlure.]

 

 

 

Le devenir des personnages manniens, c'est le devenir trace, puis fantôme. (...) un devenir fantômal, minéral. Dès lors, l'expulsion hors de l'enclos mannien ne débouche pas sur une "ouverture au monde nouveau", elle marque un profond désir de simplement disparaître.

 

 

Le syndrome de l'aquarium, par jean Baptiste Thoret, in "Simulacres, d'îles en îles", été 2000.

 

 

 

 

C'est ce que Fitzgerald appelait une vraie rupture : la ligne de fuite, non pas le voyage vers les mers du Sud, mais l'acquisition d'une clandestinité (même si l'on doit devenir animal (...)).Être enfin inconnu, comme peu de gens le sont. Le texte si beau de Fitzgerald, La Fêlure, dit : "Je me sentais pareil aux hommes que je voyais dans les trains de banlieue de Great Neck quinze ans plus tôt..."

 

Gilles Deleuze, Claire Parnet, Dialogues, Flammarion,pp.56-57

 

 

 

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Espaces/personnages - vitres/réversibilité

 

 

Le monde de Michael Mann : 

 

un entrelacs cristallin d'autoroutes et de skylines, de loft dépouillés et d'aéroports, où l'homme ne cesse d'être en transit (spatial, professionnel, amoureux).

 

 

Dans un monde où l'espace quelconque est la norme, quadrillé, monotone, désormais cartographié dans sa moindre parcelle de béton, le personnage mannien doit se résoudre à la finitude de son espace vital.

 

 

Les vitres, les parois de verre, les miroirs, toutes ces surfaces cristallines qui enclosent, participent de la mise en scène de cette effroyable transparence qui affecte autant les individus que le milieu. C'est l'environnement moderne dans toute son obscénité - minéral, réfléxif - cette mise en scène de la transparence ne cesse de renvoyer à l'homme son propre reflet.

 

 

Les innombrables surfaces vitrées qui découpent le cadre désignent le cadre comme bocal mais constituent aussi le lieu d'un affrontement entre une sensation de clôture, de claustration même, et celle d'une ouverture infinie. A la fois récipient et isolant, syndrome de l'aquarium en somme, "le verre offre des possibilités de communication accélérée entre l'intérieur et l'extérieur mais simultanément, il institue une césure invisible et matérielle, qui empêche que cette communication devienne une ouverture réelle sur le monde" [écrit Jean Baudrillard, dans Le système des objets.]

 

 

L'interface extérieur/intérieur a disparu. En même temps qu'elles enferment, encerclent et isolent les individus, les surfaces vitrées, omniprésentes, nourrissent le fantasme optique d'un dehors. Chez Mann, les décors, les personnages et les situations sont souvent basées sur la réversibilité : les vitres séparent autant qu'elles mettent en contact. Dès lors, si plus rien ne distingue l'extérieur de l'intérieur, comment résister à la conflagration des espaces, qu'ils soient publics, professionnels ou intimes ?

 

 

Le syndrome de l'aquarium, par jean Baptiste Thoret, in "Simulacres, d'îles en îles", été 2000.

 

 

 

 

 

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Collatéral de Michael Mann

par Olivier Père

Michael Mann a signé des thrillers urbains, la meilleure part de son œuvre, dans lesquels chaque élément de la mise en scène semble procéder à une déréalisation volontaire d’un matériau documentaire. Les nappes sonores et musicales, les strates d’images flottantes, les plans hyper composés parviennent à créer des films atmosphériques et planants, véritables rêves éveillés percés d’éclairs de violence. Le cinéaste réputé pour son perfectionnisme semble parfois hésiter entre l’efficacité dramatique et la quête de la pure expérience sensitive, le besoin de raconter une histoire solide avec des vedettes (nous sommes à Hollywood et un film doit rapporter de l’argent) et le désir de composer des plans vertigineux à la manière d’un peintre, d’un musicien, d’un architecte, d’un artiste. Ainsi, Collatéral (Collateral, 2004), l’un de ses plus gros succès commerciaux, peut être apprécié comme un polar captivant rythmé par des scènes d’action de plus en plus spectaculaires, et des rebondissements de scénario de plus en plus invraisemblables, avec une star au sommet de son charisme et parfait dans un contre-emploi de tueur à gages froid et impitoyable (Tom Cruise). Mais Collatéral est avant tout un magnifique poème visuel consacré à Los Angeles la nuit, et cela fait toute la différence entre le film de Michael Mann et n’importe quel polar américain, aussi réussi soit-il. Pionner de la HD à Hollywood, Mann utilise pour la première fois une caméra Thomson Grass Valley Viper FilmStream modifiée, exclusivement pour les scènes d’extérieurs nocturnes qui constituent une large partie du film, qui se déroule pendant une seule nuit dans plusieurs quartiers de Los Angeles. Mann relève le nouveau défi d’un tournage en numérique avec une inventivité et une maîtrise éblouissantes, qui confèrent à ses images une texture si particulière, dans les noirs et les gris bleutés. L’apparition furtive d’un coyote perdu sur la route, dont le pelage gris et la solitude renvoient directement au personnage de Vincent (Cruise) et à sa destinée, demeure un moment inoubliable dans la filmographie de Michael Mann.

 

 

 

 

 

POUR APPROFONDIR (sur L.A.) :

 

 

 

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MIKE DAVIS

AU-DELA DE BLADE RUNNER, LOS ANGELES ET L'IMAGINATION DU DESASTRE

Allia 2006

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


27/10/2024
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